Interview du 29
octobre 2002
Propos
recueillis par Maryline Richer
"Terre Indigo", "La Kiné",
"Méditerranée", "L'Eté rouge"... Tant de séries l'ont rendue familière aux
téléspectateurs. La comédienne s'en réjouit, elle qui depuis sa tendre
enfance, a toujours été fascinée par le métier d'actrice. Arrivée à Paris,
premiers jobs, premiers cours de comédie, premières pièces de théâtre... Le
parcours classique d'un grand nombre de comédiens ! Pourtant, le destin de
Charlotte Kady aurait pu basculer lorsque le hasard la conduit sur le
plateau de "Récré A2". Mais au bout de 5 ans, la jeune femme refuse de porter
plus longtemps l'étiquette d'animatrice pour enfants et décide alors de revenir
à sa véritable passion : la comédie. Puis c'est le véritable tournant dans sa
carrière en 1993. La voilà nominée aux Césars pour "L.627" de Tavernier. Une
belle carrière commence... Quel bonheur d'écouter Charlotte Kady parler de ses
débuts et de retracer avec elle sa belle histoire, avec toute cette passion et
cette sensibilité qui la caractérisent.
Comment vous est venue
l'envie de devenir comédienne ?
- Dès l'âge de 5 ans, dès que
j'ai commencé à voir des films... C'était comme une évidence.
A quel âge avez-vous
commencé à prendre des cours ?
- Beaucoup plus tard ! A
l'époque, ce métier n'était pas aussi accessible qu'aujourd'hui. Nous étions 6 enfants et nos parents attachaient énormément d'importance à nos
études. Comme j'étais plutôt douée pour les langues,
j'ai choisi de faire des études de langues orientales. Cela rassurait mes parents
mais c'était surtout
le prétexte pour venir à Paris, mon rêve étant d'entrer aux Cours
Simon.
Comment s'est passée votre
arrivée à Paris ?
- Ma soeur habitait Paris et
pouvait donc m'héberger. Si j'étais très attirée par le métier de
comédienne, en revanche j'étais timide et je manquais de confiance en moi.
J'étais terrorisée à l'idée de passer une audition et j'avais surtout peur d'un
refus. J'ai donc attendu 6 mois avant d'oser appeler les Cours Simon.
Et comment s'est passée
l'audition ?
- La directrice Rosine Margat a
vu mon potentiel et m'a engagée dans le cours. Elle a été ma première rencontre
professionnelle importante.
Les cours vous ont-ils
beaucoup apporté ?
- Oui. En revanche, il y avait
beaucoup de rivalités au sein du cours. Contrairement à certains élèves qui y
allaient toute la journée, j'étais considérée comme une dilettante car je ne
pouvais y aller que le soir. Dans la journée, j'allais à la fac et pour
payer mes cours de comédie, j'étais obligée de faire des petits jobs à côté, baby-sitting,
etc. Ce n'était donc pas très facile pour moi. Je n'étais pas très disponible pour les cours et par conséquent moins
bien estimée.
Vous avez fait preuve de
beaucoup de patience et votre parcours n'a pas été si simple. Que pensez-vous
aujourd'hui de la télé-réalité ?
- Je pense que c'est un vrai
danger pour les jeunes. A cause de cette surmédiatisation, ils sont éblouis par
le côté paillettes et ont tendance à oublier que les métiers artistiques ne sont
pas des métiers faciles. Il faut du talent mais aussi beaucoup de travail et
surtout une réelle passion. Il y a des hauts et de bas et il faut donc sans
cesse se remettre en questions et ne pas voir que le côté superficiel.
Comment avez-vous débuté ?
- J'ai commencé par le théâtre.
Puis, j'ai animé "Récré A2". C'était une
bonne expérience, mais au bout de 5 ans, j'ai décidé d'arrêter. On venait de me
proposer de jouer dans une pièce de théâtre. C'était donc très important pour
moi car jamais je n'avais abandonné l'idée d'être comédienne et c'était donc
l'occasion de pouvoir rejouer.
Et votre carrière au Cinéma,
comment a t-elle débuté ?
- J'ai d'abord obtenu quelques petits
rôles dans des films comme "L'Année des Méduses".
Mais c'est le film "L.627" de Tavernier en 1992 qui a marqué un véritable
tournant dans ma carrière. C'était mon premier grand rôle au Cinéma et surtout,
il m'a permis d'être nominée pour le César du meilleur espoir
féminin en 1993. C'était formidable.
Après cette nomination, les
portes se sont-elles ouvertes plus facilement ?
- Je pensais qu'elles allaient
s'ouvrir... mais bizarrement, on ne m'a pratiquement rien proposé l'année suivante.
Ensuite, il y a eu "Terre Indigo" en 1995.
Depuis quelques années, on
vous voit beaucoup jouer dans des séries ou des téléfilms et on
vous voit un peu moins au Cinéma. Est-ce un choix ?
- J'adore le Cinéma et si
d'autres occasions se présentent, ce sera merveilleux mais ce qui compte
davantage pour moi, ce sont les rôles. Grâce à la télévision, j'ai eu
l'opportunité de travailler des personnages très intéressants, comme celui de
"La Kiné" et c'est la télévision qui m'a véritablement révélée au grand public.
Parmi tous vos rôles,
avez-vous quelques préférences ?
- Chaque film est une
aventure différente. Au Cinéma, le rôle qui m'a le plus marquée, c'est "L.627".
D'une part, c'est un très beau film et d'autre part, un vrai déclic pour moi.
D'ailleurs, le film n'a pas vieilli et on m'en parle encore beaucoup
aujourd'hui. A la télé, j'ai particulièrement aimé le pilote de "La Kiné" qui
s'intitulait "Le premier pas". Dans cet épisode, il y avait un véritable travail physique et
psychologique. Cette femme
qui soigne les corps et les âmes blessées se distingue des autre héroïnes de
séries et des femmes-flics. Cette série a été une étape très importante pour moi.
Elle m'a aussi permis d'ouvrir les yeux sur le milieu hospitalier. Nous
tournions à l'hôpital St-Maurice, dans de vraies salles de rééducation. Dans
cette série, la fiction rejoignait la réalité. la plupart des figurants étaient
de vrais patients. C'était une grande leçon de vie. J'ai vu beaucoup de jeunes
qui suite à des accidents, étaient handicapés à vie. Ca permet de réfléchir et
de prendre conscience des choses. Nous avons tourné 10 épisodes en 4 ans dont
deux inédits. Le dernier épisode a été tourné au cours de l'été 2001.
Vous avez décidé d'arrêter
cette série mais si on vous proposait un nouveau rôle récurrent, accepteriez-vous
?
- Oui, d'ailleurs, j'ai déjà un
projet pour une nouvelle série dont le tournage devrait
démarrer en 2003.
Etes-vous davantage attirée
par les personnages qui vous ressemblent ou par les rôles de composition ?
- On choisit en général de
faire ce métier parce qu'on a envie d'endosser plein de vies, plein de
personnages différents et traverser des univers qui ne seront jamais les
nôtres... Mais suivant ce que l'on dégage à l'écran, il y a des personnages
auxquels on correspond mieux et qui font que les gens nous aiment. En ce qui me
concerne, on m'a plus souvent confié des rôles positifs que des rôles sombres
mais tout dépend de l'écriture du scénario, du metteur en scène et comment le
sujet est traité. Si je dois jouer un rôle à l'opposé de moi, il faut que je sois
touchée malgré tout par le personnage.
Parmi les grandes sagas
familiales dans lesquelles vous avez jouées, il y a eu "Terre Indigo",
"Méditerranée" et plus récemment "L'Eté rouge"...
Près de 10 millions de téléspectateurs
! Vous attendiez-vous à un tel succès ?
- Pour avoir joué dans
"Terre indigo" et "Méditerranée", je connaissais l'impact de ces sagas d'été.
Ces histoires de familles avec les histoires d'amour, les jalousies, les
rivalités... Les gens adorent ! Je savais que "L'Eté rouge" marcherait. Il y a
eu le coté polar qui a fait le petit plus. Ce qui a permis d'attirer non
seulement les amateurs de séries mais aussi des gens qui habituellement ne regardent pas
ce genre de programme.
L'histoire était vraiment très bien écrite. Nous-mêmes, les comédiens, à la
lecture du scénario, nous avons eu le même suspens jusqu'au dernier épisode. Le
succès de "L'Eté rouge" est une superbe récompense. En tout cas, je
suis très fière d'avoir participé à cette belle aventure.
Au cours de votre carrière,
y a t-il eu des rencontres ou des expériences très importantes ?
- Oui, il y a eu plein de
rencontres... Je ne pourrais pas en faire la liste, mais je tiens quand-même à
citer "Terre indigo" que je qualifie d'aventure humaine. Nous sommes
partis pendant 7 mois à Cuba. Nous tournions dans un endroit où nous étions
carrément coupés du monde, sans téléphone, sans fax. C'était il y a 7 ans et le
pays était encore très pauvre. Des liens très forts se sont créés entre les
comédiens : Jean-Marc Thibault, Francis Huster, Christiana Réali, Marie-José Nat, Barbara
Schulz... Une fois par semaine, un autobus nous conduisait à une
cinquantaine de kilomètres dans un endroit où il y avait un petit bureau de poste.
C'était notre promenade du dimanche. Autre anecdote ! Nous avons eu une coupure
d'eau qui a duré deux jours. Hors, nous tournions en costumes d'époque et
là-bas, il faisait très chaud. C'était donc insupportable. Lorsque l'eau est
revenue, quel bonheur ! Ce genre d'épreuves nous a énormément soudés. On
retrouve soudain les vraies valeurs des choses. Depuis, nous faisons notre vie
et notre carrière, chacun de notre côté, mais malgré tout, au bout de 7 ans,
nous sommes tous restés très liés. Je trouve ça formidable.
Il y a quelques semaines,
nous étions au festival de Colmar à l'occasion de la soirée consacrée à Henri Helman. Je pense qu'il fait lui aussi partie des belles rencontres qui ont
jalonné votre carrière ?
- Oui, bien sûr ! J'avais déjà
tourné avec lui dans "Flics de choc" et j'ai été ravie de le retrouver en 2001
dans "Méditerranée". D'ailleurs, "Méditerranée" est aussi un excellent souvenir.
5 mois de tournage et même si les conditions étaient plus confortables que pour
"Terre indigo", c'était également une expérience intense. Avec Sophie de la Rochefoucauld et Ingrid Chauvin, nous étions trois soeurs et avec la petite
Julie Dray qui jouait ma fille, des liens très forts se sont également créés.
Avec elle, il y a une scène qui m'a particulièrement marquée, et dont je
suis très fière, c'est la scène où je lui annonce qu'elle est ma fille. C'était
un véritable rôle de composition... Un vrai travail psychologique.
Vous revoyez-vous de temps
en temps ?
- En fonction de nos emplois du
temps, ce n'est pas toujours facile. J'ai revu Ingrid à Colmar pendant le
festival. Mais par contre, ce qui est drôle, c'est que les soeurs de
"Méditerranée" : Ingrid,
Sophie et moi, nous sommes toutes les trois sélectionnées cette année pour le
concours "Les femmes en or". Nous nous sommes donc retrouvées il y a quelques
jours pour la photo de Télé Star ! Pour les résultats, rendez-vous le 14
décembre à Courchevel ! Chaque fois, c'est un bonheur de se revoir. Il n'y a
aucune rivalité entre nous. Au contraire, j'adore les voir à la télé. D'ailleurs je
m'intéresse à tout ce que font les gens avec qui j'ai eu le plaisir de travailler.
Je regarde souvent des séries comme par exemple "Garonne" ou "PJ" avec Bruno Wolkowitch. Avec lui aussi, j'ai pris beaucoup de plaisir à
jouer.
Je peux vous dire que c'est
réciproque... Lorsque je lui ai demandé si "Méditerranée" était un bon souvenir,
il m'a immédiatement parlé de vous ! (Lire interview de Bruno Wolkowitch)
- Alors, avec le décalage, un
an et demi après, je lui réponds par le biais de cette interview que pour moi
aussi, c'est un très bon souvenir !!! J'espère, un jour, avoir l'occasion de
retravailler avec lui. Il nous arrive de rejouer les uns avec les autres. Dans "L'Eté rouge" par exemple, j'ai retrouvé Jacques Spiesser avec qui j'avais
déjà travaillé il y a quelques années ainsi que François-Eric Gendron qui avait
joué dans un épisode de "La Kiné". C'est toujours sympa de se retrouver d'une
série à une autre.
En tout cas, c'est avec
grand plaisir que nous vous retrouverons dans une nouvelle série... A bientôt !