En quelques années, Thierry Godard est devenu un comédien familier du petit écran, alternant les tournages de
trois séries à succès : "Engrenages" sur Canal+, "Les Dames" pour France 2 et
"Un Village français",
l'excellente série de France 3. Trois séries auxquelles s'ajoutent de
nombreux téléfilms parmi lesquels "Opération turquoise", "Fausses
innocences", "La
Disparition"... qui ont un point commun : leur qualité. Vous
l'avez compris : Thierry Godard fait partie de ces acteurs de talent à qui
l'on ne fait pas jouer n'importe quoi.
Jouer dans plusieurs séries à la fois est-ce
parfois compliqué ?
- Au niveau du planning, oui,
quelquefois... L'année dernière, par exemple, le tournage d' "Engrenages" se
croisait avec celui du "Village français",
c'est la raison pour laquelle on ne me voit pas beaucoup dans la saison 4 du "Village
français". En revanche, dans la saison 5 en préparation, je serai très présent
et je m'en réjouis !!! Lorsque
les séries s'échelonnent ainsi sur plusieurs années, les scénaristes sont
chaque fois obligés d'adapter l'histoire en fonction des disponibilités des
acteurs.
Qu'est-ce qui est intéressant dans ce
personnage de Raymond ?
- Son parcours... Au tout début de l'histoire, le jour
où les allemands arrivent à Villeneuve, Raymond tombe amoureux de Marie...
Et du coup, il voit la guerre d'une manière moins négative que les autres.
Ce personnage apportait un peu de légèreté à l'histoire. C'est ce qui m'a
plu dès le départ. J'aime le retrouver
chaque saison. J'étais d'ailleurs un peu triste de ne pas jouer
davantage dans ces nouveaux épisodes. Mais Raymond est tout de même là, tranquille, chez lui... Et même s'il
ne fait pas grand chose dans cette saison, il n'en est pas pour autant
exclu.
En tant qu'acteur, qu'est-ce qui est
passionnant dans cette série ?
- J'aime sa cohérence et la manière habile de mélanger les petites histoires de nos personnages à la
grande Histoire. Dans la saison 4, on y montre la rafle des juifs avec ce
train arrêté à Villeneuve où hommes et femmes sont hébergés à l'école du
village. Raymond aura davantage sa place dans la saison 5 où il sera
question du maquis. Il s'y trouvera embarqué malgré lui. "Un Village
français" est vraiment une belle aventure et quand la série s'arrêtera, on sera
certainement
tous un peu tristes...
Le changement de réalisateur, n'est-ce
pas parfois un peu déstabilisant pour les acteurs ?
- Non, au contraire, c'est très bien.
Chacun apporte quelque chose de différent. Il faut dire qu'on a été très gâtés
sur "Un Village
français" entre Philippe Triboit et Patrice
Martineau, en passant par Olivier Guignard, Jean-Marc Brondolo... Que de bons
réalisateurs !
Y a t-il d'autres téléfilms à annoncer ?
- Je viens de tourner pour France
2 dans "La Disparition" un téléfilm de Jean-Xavier Delestrade sur
l'affaire Viguier. C'était un vrai bonheur ! Je connaissais le travail de Delestrade. J'en suis
carrément fan. J'ai été d'autant plus fier qu'il m'ait choisi
parmi un certain nombre d'acteurs qu'il avait aussi vus pour le rôle.
Jean-Xavier est quelqu'un de calme, posé, avec qui je me suis très bien entendu. Avant le
tournage, je ne connaissais rien de l'affaire Viguier. C'est lui qui
me l'a fait découvrir. J'aime beaucoup le rôle, un type
très fermé, accusé de meurtre et qui ne fait rien pour se défendre... Un
personnage tout en retenue. Le film a obtenu le Fipa d'or 2012 du meilleur
scénario. J'ai également beaucoup aimé le téléfilm "Valparaiso"
diffusé récemment sur Arte. J'y jouais un capitaine de bateau, très dépressif... Ce qui me plaît dans ce
métier, c'est la diversité. Actuellement, je tourne "Engrenages"
jusqu'à fin avril et j'enchaînerai en juin et juillet avec de nouveaux épisodes de la
collection "Les Dames".
Pour quelqu'un qui aime la diversité, n'est-ce pas
un peu lassant de jouer des flics ?
- J'ai refusé plein de rôles de flics dans des
séries qui ne m'intéressaient pas. Dans "Les Dames",
il y a une grande liberté, un certain charme et de très jolies scènes... La
série n'est pas formatée comme la plupart des séries. C'est ce qui m'a plu
dans cette aventure. C'
est une collection faite de plusieurs volets, tous adaptés des romans d'Alexis Lecaye. Après "Les Dames",
nous tournerons "Les atouts" et on s'arrêtera là... "Engrenages"
est une série innovante mais
reste un polar avec des enquêtes et des histoires de flics. Dans ce genre de
série, c'est toujours
un peu difficile de se renouveler. Et pourtant, le succès des polars est
incontestable et les gens
en redemandent. Pour éviter la lassitude des téléspectateurs,
les scénaristes font intervenir, à certains moments, des guests, parfois au
détriment des récurrents. Ainsi, sur la nouvelle saison actuellement en tournage, pour la
première fois, nous avons trouvé nos parcours un peu moins intéressants que
d'habitude. Mais heureusement, la production et les scénaristes sont très à
l'écoute. Alors, il nous arrive de leur proposer des choses et de leur faire part
de nos envies d'acteurs... On a la chance de travailler dans de très bonnes conditions...
Et sur le tournage, vous laisse-t-on aussi une
certaine liberté de jeu ?
- Oui, Caroline Proust, Fred Bianconi et moi, on improvise
beaucoup. Il faut dire qu'au bout de plusieurs saisons, on finit par
connaître tellement nos personnages qu'on a tendance à les faire réagir
instinctivement, tout en essayant de ne pas trahir le travail des auteurs. C'est justement
la difficulté d'un rôle récurrent.
La série va t-elle continuer encore longtemps ?
- "Engrenages" connaît un énorme succès et pas
seulement en France. Elle a été vendue dans près de 70 pays et nommée aux Emmy Awards. Il n'y a pas de raison pour que la série s'arrête pour le
moment. Je reçois des courriers d'Angleterre, d'Ecosse et de partout. C'est
magique !
Des projets au Cinéma ?
- J'y ai enchaîné plein de petits rôles au cours
des années passées mais aujourd'hui, j'ai la chance de me voir proposer de
beaux projets pour la télé. Je laisse donc un peu de côté le Cinéma...
J'ai cependant un projet de film avec Simon Abkarian sur
une bande de braqueurs assez violente "Les Pink Panthers"... Simon
a écrit un scénario formidable. Mais c'est toujours compliqué de monter un
film et ça prend du temps.
Et le Théâtre ?
- J'y reviens prochainement dans "Mademoiselle
Julie" pièce de Strinberg que Robin Renucci met en scène. J'y retrouve également avec plaisir deux autres partenaires du "Village
français": Audrey Fleurot et Nade Dieu. Pour le moment, nous répétons,
trois jours par ci, trois jours par là, en fonction des plannings de chacun. Je suis ravi de rejouer au Théâtre. J'y ai débuté comme la
plupart des acteurs et j'ai fait au moins
quinze ans de théâtre avant d'obtenir des rôles importants à la télé.
Quel a été le premier grand rôle pour la télé ?
- Le
personnage d'Auguste Verdier dans "Le
Réveillon des bonnes", une série dans laquelle mon personnage
revenait de la guerre, amnésique et le crâne rasé... C'était mon premier
rôle vraiment intéressant pour la télé.
La comédie, était-ce un rêve de gosse ?
- Non. Adolescent, je voulais devenir ébéniste et
je préparais un
C.A.P. Cette envie m'était venue en entrant
dans une menuiserie. Une vraie passion qui l'est encore. J'adore travailler
le bois. Pourtant, à 17 ans, mon destin
a basculé lorsque j'ai découvert la comédie, par hasard,
grâce à un copain qui, lui, voulait devenait acteur et m'a traîné à la
bibliothèque pour lire des pièces. J'y ai pris goût. Ce copain n'est
jamais devenu acteur. En revanche, peu de temps après, j'ai quitté
Fontenay-le-Comte où je vivais à l'époque, et une fois installé à Paris, j'ai pris des cours de
théâtre. Par contre, je n'ai jamais essayé d'entrer au Conservatoire malgré
les encouragements de mes profs... Du coup, j'ai mis davantage de temps
avant de devenir acteur. Pendant longtemps, je me suis contenté de jouer des
petites pièces avec des potes. On vivotait... Mais je n'avais pas des goûts
de riche et je ne me voyais pas
faire autre chose. L'essentiel était de pouvoir jouer et vivre de ma
passion.
Bravo pour cette persévérance, aujourd'hui
récompensée par tous ces rôles qui s'enchaînent pour notre plus grand plaisir..